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ENTRETIEN #1 : AURÉLIEN

Dernière mise à jour : 24 août 2018

Aurélien est un Lillois de 36 ans. Actuellement dans la vie active dans le domaine des ressources humaines, il dispose néanmoins d'une formation universitaire en médiation culturelle, et a donc toujours été passionné par les différents univers qui constituent la culture, et notamment le cinéma.

Actif sur Sens Critique depuis quelques années déjà (2012), Aurélien est un membre qui contribue au dispositif de diverses manières : notes, listes, mais aussi critiques, qui est l'objet qui m'intéresse ici.

Voici un lien vers son profil : juste ici.

En-tête du profil Sens Critique d'Aurélien (16/08/18)

On sent chez Aurélien, dès le début de l'entretien, un engouement particulier pour Sens Critique. Il a découvert le site par le biais d'un ami, qui sur Facebook, avait partagé une critique qu'il y avait rédigé. En découvrant le site, il a d'emblée été enthousiaste : « ça faisait bien des années que (…) j'avais imaginé ce site là ». Contrairement aux autres sites qu'il a pu fréquenter, il ne trouve rien qui vaut Sens Critique : une plate-forme riche, intuitive, complète. Depuis donc, il « passe un peu [sa] vie dessus » : que ce soit au bureau où l'onglet est toujours ouvert, ou à la maison où Sens Critique est la page d'accueil de son ordinateur personnel, il y est connecté quotidiennement.

S'étant inscrit via le « Facebook Connect », sa « vraie identité » a longtemps été affichée sur le site. Récemment, il a changé son nom pour un pseudo, qui est en fait le surnom que lui donnent ses proches. (Aurélien → Kornélien). Néanmoins, sur son profil, il est toujours possible d'accéder à sa page Facebook via un lien dédié.


Avant d'écrire sur Sens Critique, Aurélien était rédacteur bénévole de critiques cinématographiques pour un site Internet, Xtrax, qui était un site dédié à la musique métal, mais qui a voulu s'ouvrir au cinéma. Il a donc commencé son parcours de rédacteur critique à ses 20 ans, pour ce site. Néanmoins, il a toujours écrit pour lui. « J'écrivais toujours des trucs pour moi tout seul en fait. Quand je regardais un film, je jetais toujours mes impressions. ». Et cela va plus loin encore : il détient, sur son ordinateur un fichier Excel, où il répertorie tous les films qu'il voit, leur met des notes et ajoute des commentaires, à titre exclusivement privé et personnel. « Forcément, quand le site est sorti, ça me permettait à la base de garder tout ça ailleurs que sur ce fichier, que j'aurais pu perdre ». L'idée au départ était donc de « garder une trace ».


Pour Aurélien, l'intérêt d'être sur un site comme Sens Critique, c'est aussi « l'interaction avec les gens », même si au départ, il n'avait « même pas l'intention de communiquer avec d'autres gens. ». Néanmoins, comme le site le permettait, et qu'il avait déjà un plaisir et un savoir-faire de l'écriture critique, il s'est lancé.

Les critiques d'Aurélien sont majoritairement des critiques cinématographiques. La raison est que selon lui, la musique appelle trop aux ressentis et aux sentiments, et il est donc compliqué de la critiquer. Il aimerait cependant se lancer dans la critique de livres, mais n'estime pas avoir « assez de connaissances en termes de techniques d'écriture pour donner un avis sur un auteur ou une façon d'écrire. ». Ainsi, il pense que pour écrire, pour critiquer une œuvre, il faut au préalable un minimum de connaissances, ce qu'il appelle « un certain bagage », ou encore « un minimum de culture », des « références ». Ces connaissances ne semblent pas pour lui donner une certaine légitimité au contributeur, mais sont impératives pour avoir « l'impression de savoir de quoi on parle ».

Aurélien ne pense pas développer quelconque professionnalisme dans sa pratique de la critique. Il le dit lui même : « Pas du tout. (…) Je fais ça en amateur ». Pourtant, il connaît les techniques de l'écriture critique professionnelle, pour l'avoir déjà pratiquée sur le site pour lequel il était rédacteur, mais aussi parce qu'il est « abonné à plusieurs magazines de cinéma », et précise que ça fait 20 ans qu'il lit des critiques. Le fait, par exemple, de devoir renoncer (si l'on suit les règles de la critique professionnelle) à l'utilisation de la première personne du singulier, semble être un élément qui le rebute à pratiquer cette forme d'écriture. On remarque cependant qu'il s'agit peut-être plus d'une façon personnelle de se voir et de se considérer, puisqu'il dit : « je ne m'estime pas à ce point là », en parlant de la critique professionnelle.

Aurélien ne semble pas avoir de rituel dans sa façon à la fois de déterminer l'objet de ses critiques, et dans la façon dont se construit la critique elle-même. Il ne critique pas tout ce qu'il voit, parce qu'il n'est « pas simple de faire une critique sur tout », et confies qu'il trouve plus de facilité à rédiger des critiques négatives, même s'il en fait aussi des positives, car selon lui, « c'est plus difficile de dire pourquoi on aime bien ». Il accorde beaucoup d'importance à la spontanéité, et au ressenti : « c'est sur le ressenti, sur le moment » ; « comment j'ai ressenti le truc », « c'est comme ça me vient ». On note donc que la subjectivité prime dans sa façon de construire ses critiques, même si, selon lui, il essaye de rester objectif, « mais c'est compliqué ».

Lorsqu'il regarde un film, il pense dans le même temps à la note, et même à la critique. Il analyse, porte une attention particulière à certains détails, « essaye de se souvenir de scènes » ; et construit son jugement en même temps qu'il consomme l'oeuvre, de manière presque automatique puisqu'il dit que c'est devenu « un réflexe ». Néanmoins, il confie qu'il a « l'impression que ça [lui] gâche un peu le moment ».

Quand je l'ai questionné sur ce que lui apporte personnellement la pratique de la critique, sa première réponse a été le plaisir d'écrire, sur lequel il insiste, et revient plusieurs fois lors de cet entretien. Cette réponse a ensuite été complétée par « et que en plus, on puisse être lu par tout le monde … même si c'est pas la raison n°1 qui me pousse à écrire. ». Néanmoins, il constate que la communauté Sens Critique, depuis 2012, s'est largement agrandie. De ce fait, il confie avoir l'impression de se retrouver « un peu noyé dans la masse ». Il n'est pas attentif aux chiffres liés à ses publications, et ne s'intéresse pas au nombre de personnes qui lisent ses critiques. « Tu sais pas qui lit. Tu sais combien, mais c'est anonyme ». Ce à quoi il est plus attentif, ce sont les commentaires.

Pour lui, il est aujourd'hui difficile d'être lu, d'être visible. En effet, il indique la présence de "stars" sur le site « qui ont énormément d'abonnés, et qui interagissent beaucoup avec ». Il décrit « une espèce d'écosystème », la présence d'une « hiérarchie » entre les utilisateurs, des échanges de bons procédés entre membres (tu me suis, je te suis ; tu me likes, je te like...), voire même des règlements de compte avec ces dites « stars », qui s'éloignent alors complètement de l'objet du dispositif. « Ca m'a un peu donné une image de l'état d'esprit de certains, et ça m'intéresse pas trop de tomber là dedans. ».

Il fait un parallèle entre ces "stars" de Sens Critique, et les influenceuces sur Instagram en disant qu' « elles ne sont pas plus légitimes que toi à faire des photos, mais bon, c'est juste parce qu'elles sont populaires ». Il parle ensuite d'un contributeur très actif sur Sens Critique, qui détient énormément d'abonnés, et qui est presque devenu une entité du site (les autres membres spéculent sur les notes qu'il va mettre, par exemple). Cet utilisateur avait même décroché des interviews sur d'autres sites, tant son activité sur Sens Critique est importante. A sa façon d'en parler, on remarque qu'Aurélien n'est vraiment pas du tout intéressé par ce type de posture, et "condamne" Sens Critique, qui contribue à l'établissement de hiérarchies entre ses membres par la création du « Club des insiders », et il comprend alors pourquoi « même quand il a rien à dire, il écrit ».

Aurélien n'est donc pas intéressé par sa popularité sur Sens Critique, et confie qu'il préfère « avoir peu de personnes avec qui [il] parle régulièrement. » Le plaisir d'être lu est présent, mais ce qu'Aurélien regrette, c'est de ne pas avoir plus de discussions avec les membres du site. « Au début, je pensais qu'il y aurait plus d'interactions, mais au final, il n'y en a pas tant que ça. ». « J'aimerais plus discuter avec les gens sur leur ressentis, tout ça. ». Mais il confie que ses goûts cinématographiques sont particuliers, et pense que « ce n'est pas ce qui intéresse le plus les gens. »

Il a cependant rencontré par le biais du site quelques personnes, qu'il ne connaissait pas en dehors, avec qui il discute souvent, exclusivement via Sens Critique. Ces personnes sont des membres qui ont les mêmes goûts que lui, et avec qui il échange à chaque interaction sur le site de l'un ou de l'autre (une note, un commentaire), ou lorsqu'ils veulent se faire découvrir de nouvelles choses. Ces personnes sont donc pour Aurélien des véritables leviers de la recommandation culturelle, personnalisée puisque ces personnes partagent ses passions. D'ailleurs, il confie : « je sais pas à quoi il ressemble, ni comment il s'appelle... On parle vraiment exclusivement de métal, de musique, c'est tout. ».

Aurélien choisit ses éclaireurs principalement en fonction de leurs goûts : ce sont des membres qui partagent les siens. Sinon, ce sont des personnes dont il trouve la façon de penser, ou d'écrire intéressante. Le reste de ses éclaireurs sont des gens qu'il connaît, en dehors du site. Lorsque quelqu'un le choisit comme éclaireur, il va automatiquement suivre cette personne en retour : « C'est une règle que je me suis fixée ». Cela s'entend, puisque la volonté d'Aurélien est d'avoir des discussions avec les membres du site, une personne qui le suit est une personne qui s'intéresse à lui, à ses goûts, et sera donc un potentiel futur interlocuteur.


Nous nous sommes ensuite recentrés sur la critique. Avant de voir un film, Aurélien va toujours lire les critiques qui sont rédigées sur celui-ci, via différents médias. Il confie cependant qu'il ne se laisse pas influencer par celles-ci (ni pendant le visionnage, ni pendant la rédaction de sa critique), et qu'il « essaye d'être le plus spontané possible ». Il dit également que généralement, « les critiques sur un film disent à peu près toujours la même chose ». Sa posture est alors d'essayer de faire en sorte de dire autre chose que ce que tout le monde dit. Aurélien semble donc critiquer quand il a quelque chose de différent à dire des autres, et lit donc des critiques non pas pour s'inspirer, mais pour voir ce qui s'y dit, et pouvoir dire autre chose.

Aurélien déclare critiquer pour lui « à 100% (…) pas pour les autres ». Mais il nuance son propos, car selon lui, si quelqu'un investit ce genre de site avec ce genre de pratiques, c'est « inconsciemment toujours pour quelqu'un. Pour être vu. ». Cependant, il n'a pas « l'impression, personnellement, d'écrire pour ça. ». Il donne comme exemple pour se justifier qu'il s'est donné le pari pour 2018 de critiquer, sur Sens Critique, les films de Jean-Claude Van Damme, pari qu'il qualifie de « trip personnel ». Lorsqu'il publie une critique sur le site, il va également, la plupart du temps, la partager sur son profil Facebook, car il trouve sur Facebook, en présence de son entourage et des gens qu'il connait, plus d'interactions que sur Sens Critique. Il évoque aussi le fait qu'il est « difficile de débattre avec des gens d'Internet », et la présence de trolls sur le site, ce qui rend les débats moins constructifs, moins intéressants, qu'avec les personnes avec qui il est amis Facebook.

Il revient ensuite sur sa volonté de « garder une trace », de ce qu'il a vu, de ce qu'il en a pensé, de ce qu'il a ressenti. Les listes sont aussi une part essentielle de son activité sur Sens Critique : elles sont pour lui quelque chose de plus de concret qu'une critique, qui est elle personnelle. « Parce que quand j'étais gamin, je créais des listes. (…) tu sais quand t'as pas Internet, bah tu fais des listes : les réalisateurs, les acteurs... etc. »

Aurélien utilise Sens Critique pour voir les « avis des gens, hors presse ». Il évoque ensuite sa difficulté à prendre en compte ce que disent les critiques professionnelles, en se demandant toujours s'ils n'ont pas été rémunérés pour dire du bien des films sur lesquels ils rédigent. Il dit ne pas « avoir confiance en la critique presse », qu'il ne trouve plus très objective, et pour lui, ce sont « les critiques des utilisateurs qui sont au plus près des choses, ça donne un avis plus intéressant, surtout plus vrai ». D'ailleurs, depuis qu'il connaît Sens Critique, Aurélien ne fréquentent plus d'autres médias. Et cette perte de confiance envers les médias traditionnels semble être pour lui une des raisons qui a motivé son engagement dans la pratique, et la publication, de ses critiques sur un site comme Sens Critique.



MOTS OU EXPRESSIONS IMPORTANTS / RÉPÉTÉS - Garder une trace

- Ressentis/impressions

- Plaisir d'écrire

- interactions/discussions

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